Afrique

Martin Dibobe – Premier noir conducteur de train en Allemagne


L’oubli est la ruse du diable!
Né le 21 octobre 1876 au Kamerun ( Bonapriso), Martin Dibobe est l’une des personnalités noires les plus célèbres en Allemagne d’avant la 1ère guerre mondiale.
De son vrai nom Quane a Dibobe, il est rebaptisé Martin Dibobe par des missionnaires allemands qui lui apprennent à lire et à écrire leur langue. En 1896, le jeune homme de 20 ans se rend en Allemagne pour participer à la grande exposition industrielle de Berlin.
Il y retrouve une centaine d’autres Africains issus de territoires contrôlés par l’Allemagne.


Ils sont exposés dans des zoos humains où Dibobe joue le rôle d’un indigène primitif afin de représenter la « vie quotidienne dans les colonies ». L’exposition dure 6 mois et est visitée par environ 7 millions d’allemands.
A la fin de l’exposition, Dibobe reste à Berlin et commence un apprentissage de serrurier dans une entreprise. En 1900, il épouse Hélène Noster la fille du propriétaire de son logement malgré les objections des autorités coloniales. Ils auront deux enfants.
En 1902, il entre à la compagnie des chemins de fer de Berlin et devient très rapidement rapidement conducteur de train de première classe. Ce qui lui vaut une certaine célébrité.

Martin Dibobe, 1902


Malgré l’éloignement, Dibobe est resté en contact avec son pays natal.
En 1907, il est envoyé au Kamerun par les autorités coloniales pour mission de superviser la construction d’une ligne de chemin de fer. Sur place, Dibobé est choqué par les méthodes brutales et iniques des colons, le racisme, les expropriations, la maltraitance des camerounais.
De retour en Allemagne, il milite pour les droits des noirs en Allemagne, pour l’égalité des races. Il participe à des grèves ouvrières, sympathise avec les sociaux-démocrates, défend l’égalité de statut pour les Africains. Il milite au sein de la “Afrikanische Hilsverein” une association d’entraide africaine dans une Allemagne raciste et discriminatoire.
Il milite même au sein de l’organisation de la Ligue des droits de l’Homme, créée en 1914.
Avec 17 autres Africains vivant en Allemagne et au nom des Africains vivant dans les colonies allemandes, Dibobe adresse une pétition au gouvernement en 1919 afin de réclamer l’indépendance, l’égalité des droits, la fin du travail forcé, une représentation politique.
Après la première guerre mondiale, le traité de Versailles (1919) partage le Kamerun en deux territoires sous mandats distincts : le Cameroun français et le Cameroun britannique.


En 1922, il décide de retourner au Cameroun avec sa famille. Cependant, à son arrivée, les autorités françaises qui administrent désormais le Cameroun lui refusent l’entrée sur le territoire, craignant qu’il puisse créer des révoltes en faveur des allemands et insuffler un sentiment antifrançais. Agé de 45 ans, Dibobe décide alors de se rendre au Liberia où perd définitivement sa trace. Il a vécu et y est mort.
Son histoire est très peu connue au Cameroun. La mémoire de ce courageux militant anticolonialiste a été honorée le 22 juillet 2019 en Allemagne avec une deuxième plaque au centre administratif de Berlin.


En effet, la ville a pris la résolution de retirer des noms de rues célébrant d’anciens esclavagistes et colonisateurs pour les remplacer par des noms d’anciens défenseurs des libertés fondamentales, des activistes de l’égalité des droits et des militants ou résistants anticolonialistes. Le 27 juin 2023, un google doodle a célébré et rendu hommage premier noir conducteur de train en Allemagne.


Arol KETCH – 26.05.2024
Rat des archives

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