Cameroun

Il y a t-il un problème Bamileké au Cameroun ?

Il est peut-être temps d’avoir le courage d’explorer cette question.

Une exploration de la revue de la presse depuis 1960 nous permet de constater que les bamileké sont toujours pointés du doigts. Que leur reproche t-on au juste ?

Dans la prestigieuse revue Défense nationale publiée en mars 1960, le lieutenant-colonel français Jean Lamberton écrivait :

« Le Cameroun s’engage sur les chemins de l’indépendance avec, dans sa chaussure un caillou bien gênant. Ce caillou, c’est la présence d’une minorité ethnique, les Bamiléké (…), la France ne saurait s’en désintéresser »

Durant la colonisation, l’administration coloniale a mené une campagne violente et virulente contre les Bamiléké qu’elle trouve dangereux et imprévisibles. Ils cristallisent toutes les phobies françaises.

On parle de : “cancer bamiléké”, “mal bamiléké”, “peste bamiléké”, “invasion bamiléké”, “colonisation bamiléké”, “masse bamiléké » .

Les Bamiléké sont alors perçus comme un groupe homogène qui veut dominer les autres ethnies, s’est levé contre la France et veut conquérir le pouvoir. C’est ainsi qu’une répression est organisée contre les bamiléké au niveau national et même local.

Des quartiers perçus comme bamiléké sont considérés comme dangereux : “ Désormais , ce sont les quartiers où se concentrent les Bamiléké qui préoccupent en priorité les autorités et sont la cible des attaques des forces de l’ordre, qui y multiplient “bouclages” et “ratissages””.

Dans les archives on peut lire : “ Les Bamiléké continuent […] de s’étendre au-delà de leurs circonscriptions, écrit ainsi en janvier 1960 l’ex-Haut Commissaire René Hoffner, et l’infiltration de 40 000 des leurs au cœur même de Douala constituerait une grave menace si ces éléments venaient à faire corps dans tout le système littoral avec l’Union des populations camerounaises”.

Le quartier Congo sera un laboratoire de l’expérimentation de cette répression anti-bamiléké et l’expérience va se matérialiser par l’incendie de ce quartier peuplé en majorité de Bamiléké.

L’exécution de Nya Thaddée en 1965 s’inscrit dans le sillage de la répression des “ complots bamiléké”. La hiérarchie politico-administrative craint la “montée en puissance des bamiléké”; la suspicion et la délation s’installent.

Les Bamiléké, même membre du gouvernement et du parti présidentiel, sont suspectés d’une certaine proximité avec les “rebelles” ( nationalistes). C’est ainsi qu’on va fabriquer plusieurs complots pour inquiétés de hauts-dignitaires bamilékés.

“Vous les Bamiléké, que voulez-vous montrer dans ce pays ? […] Nous allons voir. Je vais les arrêter tous […] Vous les Bamiléké, vous croyez que le Cameroun, c’est vous” avait tranché le sinistre Jean Fochivé en 1965.

Après la colonisation, le doigt accusateur est toujours pointé sur les bamileké qu’on qualifie d’envahisseurs comme à la période coloniale. Même les Bamileké qui sont nés dans d’autres régions et ne connaissent pas leurs régions d’origine, sont régulièrement sommés de rentrer chez eux .

Des marches sont régulièrement organisées contre les bamileké. Certains intellectuels affirment et soutiennent même « qu’un Bamileké ne sera jamais président au Cameroun ». A chaque fois qu’il y a des manifestations ou des contestations contre le pouvoir à l’intérieur comme à l’extérieur du pays , le doigt accusateur est pointé vers les bamileké.

C’est ainsi que l’opposition à Paul Biya au début des années 90 étaient taxé d’opposition « anglo-Bamileké » , de la même manière après les élections de 2018, la brigade anti Sardinard qui sévi à l’étranger taxée de groupuscule Bamileké.

Aujourd’hui les bamileké sont accusés d’envahir les autres régions et d’acquérir les domaines fonciers .

On parle à présent freiner la propagation des Bamileké et que chacun rentre chez soi

La terre est sale ! si è ne Mvit !

Arol Ketch – 25.05.2023

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