Ils ont osé dire non au changement de la Constitution pour s’éterniser au pouvoir
En Centrafrique, deuxième pays le plus pauvre au monde, la Cour constitutionnelle a jugé non conforme à la loi le décret du président Touadéra, permettant la création du comité chargé de rédiger la nouvelle loi fondamentale. En effet, le Président Faustin Archange Touadéra voulait changer la constitution pour s’éterniser au pouvoir alors que la constitution centrafricaine interdit au président, élu une première fois en 2016 et réélu en 2020 au terme d’un scrutin contesté, de briguer un troisième mandat.
Fait rare en Afrique Centrale, Danièle Darlan, présidente de la Cour constitutionnelle; malgré les pressions et tentatives de corruption a assumé ses responsabilités devant l’Histoire et a dit non au projet de révision de la constitution. À la fin août, les magistrats suprêmes s’étaient déjà opposés au président en rejetant certaines des dispositions de son projet de cryptomonnaie.
Rendons hommage à ces valeureux et valeureuses africains qui ont annihilé les projets d’éternisation au pouvoir des potentats en herbe. Les tripatouillages constitutionnels sont de véritables entraves à la démocratie.
→ Niger
Au Niger, la tentative de modification de la constitution de Mamadou Tandja en vue de s’éterniser au Pouvoir a été bloquée en 2009 par le parlement et la cour constitutionnelle de son pays. Salifou Fatimata Bazeye, une femme forte et intègre, s’est opposée malgré les menaces au projet du dictateur Tandja en lançant net au président les yeux dans les yeux : « la cour veillera au respect de la légalité républicaine ». Tandja a été renversé quelques mois après par un putsch et la démocratie s’est installée au Niger.
→ Zambie
En 2001, malgré une majorité confortable au parlement, Frederick Chiluba de Zambie n’a pas réussi à modifier la constitution pour briguer un troisième mandat. Il a dû y renoncer sous les protestations de l’opinion.
→ Malawi
En 2002, le Parlement malawite s’est opposé à ce que Bakili Muluzi brigue deux ans plus tard un troisième mandat, auquel l’opposition et les Églises étaient hostiles.
→ Nigeria
En 2006, Olusegun Obasandjo au Nigeria vit sa tentative de modification de la constitution bloquée par le parlement. Le Président nigérian, Olusegun Obasanjo, va lui même saluer le rejet par l’Assemblée fédérale du projet de modification constitutionnel pour autoriser un troisième mandat présidentiel, qualifiant ce vote négatif de « victoire pour la démocratie ».
« Nous devons accepter la décision de l’Assemblée nationale. La Constitution doit rester sacrée et magnifiée”
→ Burundi
Le 21 mars 2014 l’assemblée nationale du Burundi a retoqué le projet de révision constitutionnelle de Pierre Nkurunziza. Ce qui n’a pas empêché celui-ci de passer en force.
→ Burkina Faso
En 2014, Blaise Compaoré qui voulait modifier la constitution pour s’éterniser au pouvoir a été balayé par la révolution Burkinabè. Comme l’a relevé François Hollande lors du XVème Sommet de la Francophonie à Dakar, « Ce qu’a fait le peuple burkinabè, doit faire réfléchir ceux qui voudraient se maintenir à la tête de leur pays en violant l’ordre constitutionnel. Parce que ce sont les peuples qui décident.»
Une fois de plus, l’Afrique a besoin d’Hommes forts, honnêtes, patriotes et courageux pour veiller au respect des lois et incarner les institutions fortes. L’histoire est du côté des courageux, des patriotes et non dans le camp de ceux qui se servent de « coups d’État constitutionnels » pour s’éterniser au pouvoir.
Les tripatouillages constitutionnels, le refus d’alternance, le musellement de l’opposition politique, les élections truquées, la dévolution monarchique du pouvoir, les dérives dictatoriales sont les causes sous-jacentes aux coups d’État et à l’instabilité. On l’a notamment vu récemment en Guinée où Alpha Condé a été renversé par un coup d’Etat après avoir changé la constitution pour s’éterniser au pouvoir.
Arol KETCH – 28.09.2022
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