John Pololo, le loubard
John Pololo dit Sogbi Jonathan de son vrai nom Seri Gnadre Lazare est une figure emblématique du banditisme en Côte d’Ivoire.
C’est l’un des plus célèbres gangsters qu’a connu la Côte d’ivoire. Il a sévi dans les rues abidjanaises durant les années 80-90. Il était doté d’un physique impressionnant et d’un charisme naturel. Plusieurs légendes relatent ses exploits vrais ou supposés. John Pololo, c’est plusieurs personnages en un seul. C’est l’histoire d’un grand pratiquant d’arts martiaux, un très bon danseur qui va s’illustrer avec brio dans le grand banditisme. Il est le père du « Logobi », un genre musical qui signifie en nouchi « faire le malin » et qui a donné une danse codifiée par Pololo.
Pololo est considéré comme l’un des pères du Nouchi (forme d’argot ivoirien), tant il a enrichi ce parler. Il a créé plusieurs néologismes et a largement contribué à populariser ce parler populaire. En plus d’avoir vulgarisé le Nouchi, il a aussi vulgarisé une démarche et une manière de s’habiller. Plusieurs artistes africains lui doivent leur renommée. John Pololo était un loubard, il était le boss des loubards et employait des « gros bras ».
John Pololo adorait la castagne mais il avait surtout la tchatche. En plus d’être un redoutable guerrier, c’était un beau parleur. Très éloquent, il réussissait toujours à prendre l’ascendant psychologique sur son interlocuteur. Teigneux, il réussissait toujours à obtenir ce qu’il voulait et il ne reculait devant personne. Il adorait les combats de rue.Pololo connaissait parfaitement le milieu carcéral pour y avoir séjourné à plusieurs reprises.
Lors de leur passage en prison où ils avaient été transférés en raison de leurs activités au sein de la FESCI, des leaders estudiantins comme Guillaume Soro, Blé Goudé Charles ou Damana Pikass auraient été protégés en prison par John Pololo, celui-ci les aurait pris sous son aile. Mais John Pololo ce n’était pas un ange, c’était un criminel notoire, un repris de justice. A son actif : braquages, extorsions de fonds, viols, meurtres etc.C’était un tueur à gage. Il était chargé de l’exécution de sales besognes. Il a été chargé d’exécuter plusieurs grandes personnalités. C’était un mercenaire qui vendait très cher ses services aux hommes politiques. Ses services ont par exemple été utilisés par la Présidence ivoirienne pour casser les grèves et manifestations de l’opposition naissante. On parlait alors des vagabonds salariés.On lui attribuait plusieurs pouvoirs mystiques. On le disait si coriace que même les balles ne pouvaient le tuer.
Pololo a été abattu après le coup d’Etat de décembre 1999 contre Konan Bédié qui porte le général Robert Guei au pouvoir. Désireux d’assurer la sécurisation de la ville d’Abidjan, les putschistes mettent en place une nouvelle cellule appelée PC Crise dirigée par Boka Yapi. Ils vont dresser une liste de loubards à éliminer le plus vite possible. La légende raconte que lorsque Pololo a été capturé par les militaires après une altercation dans la rue ; ceux-ci ont essayé de l’abattre mais sans succès, il n’a même pas été blessé. Ils ont donc été obligés de l’attacher à deux camions et de l’écarteler. Toujours est-il que Pololo a été sauvagement été torturé avant de rendre l’âme. C’était le 13 janvier 2000. Pololo détenait plusieurs secrets d’Etat sur de hautes personnalités. Criminel sans pitié, il était capable de tuer de sang-froid. Malgré tout, il était très populaire chez les jeunes qui l’idolâtraient. C’était leur Rambo. Il était à la fois ange et démon. Il était capable d’être d’une gentillesse profonde mais aussi d’une cruauté indicible. Toujours est-il qu’il a marqué toute une génération d’ivoiriens en bien comme en mal. Plus de 20 ans après sa mort, son nom continue de régner dans les rues d’Abidjan. Une rue d’Abidjan siège de ses exploits porte son nom. Le célèbre artiste ivoirien Dezy Champion a composé une chanson à sa mort pour lui rendre hommage.
Arol KETCH – 05.08.2021
Rat des archives Fourmi Magnan égarée