Nous sommes en 1973 au Tchad, le Président Tombalbaye qui est au pouvoir est l’objet de complots réels et imaginaires. L’homme qui veut absolument maintenir son pouvoir est profondément ancré dans les traditions africaines; il croit au pouvoir des fétiches et en la magie noire.
En 1973, le président François Tombalbaye troque définitivement le costume cravate traditionnel contre le calot en peau de léopard, l’Abacost de bonne coupe et le foulard de choix avec pochette assortie. Il prône le changement des prénoms empruntés à l’occident pour des prénoms d’origine africaine, lui-même passant de François à N’garta ce qui signifie « le vrai chef ».
Il exalte la « tchaditude », théorie qui aurait précédé selon lui le christianisme et l’Islam.
Cette théorie implique le retour à l’authenticité, le rétablissement des chefferies traditionnelles et l’exaltation du rite d’initiation traditionnel : le « yondo », rite particulièrement difficile et éprouvant. Les nombreuses balafres qui zèbrent le visage du désormais N’garta Tombalbaye sont un témoignage de la dureté de ce rite. Selon N’garta Tombalbaye ce rite a pour finalité de réaliser une intégration, une socialisation des jeunes dans un contexte tchadien.
C’est dans ce contexte qu’apparaît le fameux complot du mouton noir. Un complot que N’garta Tombalbaye dit avoir éventré. Il s’agit selon lui d’un complot mystique mis en place pour l’assassiner mystiquement. L’acte d’accusation prête à sourire. Un groupuscule est accusé d’être allé à Kousseri, au Cameroun et y ont organisé une cérémonie de magie noire.
Ils sont accusés d’avoir enterré vivant dans la pénombre de la nuit, un mouton noir, symbolisant le chef de l’État, après lui avoir crevé les yeux. Les Trois marabouts recrutés par les conjurés auraient alors prononcé des incantations pour que le Président Tombalbaye soit renversé et assassiné.
Ayant eu vent de ce complot, les fins limiers et espions tchadiens, vont immédiatement arrêter les conjurés et leurs complices. Mme Kaltouma Guembang, ancienne présidente des femmes du parti progressiste tchadien est arrêtée avec 31 complices, parmi lesquels le Camerounais Grégoire Biket, ancien directeur de la Radiodiffusion nationale tchadienne.
Le général Félix Malloum est accusé de faire partie de ce fameux complot du mouton noir et est arrêté.
Les magistrats ont sanctionné les accusés par des peines de sept années de travaux forcés pour les deux principaux accusés et des condamnations allant de dix-huit mois à quatre ans de prison pour quelques autres.
Le général Félix Malloum va rester enfermé pendant près de deux ans. Arrêté le 24 juin 1973, il est libéré le 13 avril 1975 à la suite d’un coup d’État militaire, à la faveur duquel il est désigné président du Conseil supérieur militaire (CSM), organe suprême chargé de diriger le pays, puis chef de l’État quelques mois plus tard.
Arol KETCH – 28.04.2021
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